23.3.14

Le Cri de l'encre

Du 22 janvier au 22 février 2014, j'étais en résidence au collège Henri Agarande à Kourou en Guyane. L'opération intitulée "Le Cri de l'Encre" avait pour but de donner aux élèves la possibilité d'exprimer leur violence autrement : écriture, théâtre, arts plastiques… c'est-à-dire de ne pas garder pour eux leurs souffrances, leurs rancoeurs, leurs doutes, leurs idées mais de partager. Avec la collaboration étroite de l'équipe pédagogique et l'aide du Théâtre de l'Entonnoir, j'ai rencontré et fait travailler environ cinq cents élèves, c'est-à-dire la moitié de l'établissement, en insistant sur les classes SEGPA, ULIS… donc en m'adressant plus spécialement aux collégiens en difficulté. Résultat: une production foisonnante et inattendue, témoignages écrits, saynètes, poèmes, visages gueulants, masques, sculptures hurlantes, voire chaises à cris…

chaise à cris

Cris en argile, masques en techno, grands gueulards 

Dessins et textes

J'ai envie de le tuer
Il est toujours là
entrain de m'insulter
et quand il m'insulte
mon crâne commence à chauffer
Et là
une colère surgit en moi
J'ai envie de crier
comme un homme
à qui on a tué la femme
sous ses yeux
Et dans ma tête
j'entends une voix
qui me dit
tue-le tue-le
tue-le tue-le
Ou comme un chien
à qui on a arraché son os
Le voir courir autour de moi
entrain de m'insulter
Là j'ai envie
de lui tirer une balle
Le voir sourire
je veux lui couper la tête
Le voir chanter
ma tête prend feu
et j'ai envie de crier
hurler je le hais je le hais
Il m'énerve il m'énerve
Aaaaa !

Un élève de 5ème


Chaise à cris ensemble


Comme souvent en métropole, mais prenant ici un aspect particulièrement aigu, les relations entre élèves oscillent entre moqueries et bousculades. Et parfois ça dégénère. Rien d'autre ou presque, absence chronique d'échange et de dialogue. Je ne leur jette pas la pierre. La cour d'un collège est une image révélatrice de notre société. Le soi disant humour basé sur le déjà vu des émissions "people" ou la fascination à peine voilée de la violence récurrente dans les séries policières en sont une autre image. Face à cette niaiserie ambiante qui s'insinue dans nos coeurs par le biais des nouvelles technologies dont les commanditaires préfèrent les "cerveaux disponibles" à l'émancipation des êtres, il convient de se révolter. Il n'y a pas de fatalité. L'organisation actuelle du monde (économique et politique) n'est pas la seule viable. L'éducation comme la formation sont des priorités absolues que nous devons soutenir et auxquelles j'encourage tous ceux qui le peuvent à participer.




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