Le 28 janvier dernier, Agnès, Emilie, Emmanuelle et moi-même avons donné notre premier bal littéraire à la demande de Yann Moullec du CR10 (Espace Jemmapes).
Il s'agissait dans un premier temps d'arpenter les rues du 10ème arrondissement, de s'en imprégner, d'écouter ce que la ville avait "à nous dire", d'écrire nos impressions, de poursuivre jusqu'à ce que des personnages apparaissent et que naissent des histoires. Nous avons enfin construit un déroulé où la fin de chaque séquence annonce le titre de la musique à suivre... et surtout à danser.
Ça a été un vrai plaisir de créer ce bal littéraire. La succession lecture des textes et danse s'est faite tout naturellement et les spectateurs ont montré combien ils appréciaient le concept.
Je suis friand de ce type de résidence qui amène à écrire à partir du territoire. Nous n'avions que quatre jours. Etre à l'affut des étonnements que l'extérieur provoque en moi et les transcrire au plus près du ressenti est un vrai challenge. A titre d'exemple, voici ci-dessous le texte que j'ai écrit et qui ouvrait le bal :
Voie 9
Café crème
Prochain départ destination Berlin
Vent glacial sous le hall de la gare
J'attends
Quoi ? Je ne sais pas
Une femme, pantalon gris, tombe en pleurs
Une seconde la voilà centre du monde
Et la gare toute entière tourne autour d'elle
Et le ciel idem avec l'Etoile Polaire
Il y a ceux qui partent
Il y a ceux qui restent
Moi j'ouvre le journal sans le lire
Je regarde
Le carnaval des voyageurs
Des rendez-vous
Des serments
Ceux d'une heure
Ceux d'une vie
Je t'aime
Ne m'oublie pas
Ils s'enlacent
Ils s'embrassent
Ils s'entassent
Ils s'enchâssent
Et tout autour la foule à marée haute
Je ne pars pas
Je ne reste pas
Je viens souvent pourtant
Sur le quai de la gare
Humer l'air
Comme si moi aussi Varsovie Moscou Valdivostok
Rêver
Etre quelqu'un d'autre
Toujours sur un pied
Et une place première classe comme chambre à coucher
Scruter les départs
Les déchirements
Je t'aime
Ne m'oublie pas
Les bascules
Les évidences
Vous savez au moment où tout change
On s'engage
On ne sait pas pourquoi
On se dit : ça suffit
Et on ne reste pas
On part
Avec appréhension
Avec joie
Les deux en instantané
Pas de valise pas de balise
Juste aller voir là-bas
Ou plus loin encore au delà de l'horizon
En chacun de nous, vous savez,
Sommeille le nomade incertain que nous étions à l'aube des temps
Je t'aime ne m'oublie pas.
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